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Les communistes et les religions

mercredi 18 octobre 2017 par Francis Arzalier

Ce texte n’a pas la prétention de répondre à toutes les questions, sur un sujet important aujourd’hui pour les luttes à mener, mais il a l’ambition de lancer une discussion entre adhérents de l’ANC, que nous appelons à réagir par des contributions. Nous faisons la même proposition a nos amis, croyants ou incroyants, extérieurs à notre association.

Pour une approche marxiste des religions.

On cite souvent à propos des relations entre les Communistes et les religions la fameuse phrase de Marx :" la religion est un opium du peuple", en oubliant de dire que cette citation est incomplète. Marx dit en fait, dans la " critique de la philosophie du droit de Hegel" (1843) : " la religion est tout à la fois l’expression de la misère réelle et de la protestation contre la misère réelle. C’est le soupir de la créature accablée, l’âme d’un monde sans cœur..." : ce qui est une façon de définir les "croyants" comme des victimes des souffrances sociales, susceptibles de les combattre comme les autres prolétaires, et non pas des complices des exploiteurs.

Rationaliste, Marx était évidemment opposé à toutes les croyances religieuses, parce qu’il les considérait comme des réponses irrationnelles aux difficultés de la vie réelle. Mais il n’a jamais fait de la lutte antireligieuse l’objectif premier du combat des communistes. Dans son "Manifeste du Parti Communiste" (1848), dès le Préambule, il proclame : « un spectre hante l’Europe - le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont alliées pour mener à ce spectre une sainte chasse à courre : le pape et le tsar, Metternich et Guizot, les radicaux de France et les policiers d’Allemagne... »

Les Puissances qu’il vise sont détenteurs de pouvoir politique, y compris le Pape : en 1848, il est certes chef de l’église catholique, mais aussi monarque absolu d’une partie de l’Italie, participant à la coalition anticommuniste à ce titre, avec les autres défenseurs de l’exploitation capitaliste. Sa dénonciation vise plus les manipulations politiciennes des " croyants" que la religion elle-même.

Un peu plus loin dans le "Manifeste", il dénonce le " socialisme féodal " ou "chrétien", typique manipulation des sentiments religieux : " rien n’est plus facile que de donner à l’ascétisme chrétien un vernis socialiste. Le Christianisme ne s’est-il pas élevé lui aussi contre la propriété privée, contre le mariage, contre l’État ? N’a-t-il pas prêché à leur place la charité et la mendicité, le célibat et la mortification de la chair, la vie monastique et l’Église ?..."

Remarquons que Marx n’attaque pas "l’ascétisme chrétien", c’est à dire sa dimension morale, mais se plaît au contraire à souligner ses parentés avec l’aspiration communiste.
C’est dans la même optique que Marx dénonce l’immoralisme de la bourgeoisie moderne : "elle n’a laissé subsister d’autre lien entre l’homme et l’homme que l’intérêt nu, que le froid argent comptant. Elle a noyé dans les eaux glacées les frissons sacrés de la piété exaltée..."

L’analyse de la religion par Marx est très dialectique, constate les contradictions internes aux communautés de "croyants" alors que l’anticléricalisme vulgaire n’en tient aucun compte. Elle est de plus, parfaitement actuelle sa phrase sur "les eaux glacées du calcul égoïste" convient aussi bien pour le "chrétien" Fillon que pour Cahuzac, PS et "incroyant », ou Macron, fidèle des dogmes du libéralisme, tous trois fermes défenseurs du capitalisme : leur rapport différent à la religion ne change rien en l’occurrence.

Les Communistes du XXIeme siècle, restés fidèles à leur idéal, comme ceux auxquels s’adressait Marx en 1848, ne peuvent réduire les mécanismes sociaux à une opposition entre "croyants" et "incroyants" : ils savent qu’au contraire la contradiction essentielle qui la traverse est un antagonisme de classe, entre le prolétariat, qui n’a pour vivre que le fruit de son travail, et les capitalistes et tous ceux à leur service, qui tirent profit du travail d’autrui, par le biais du salariat.

Du reste, si dans la France du XIXeme siècle, l’Église catholique était très influente notamment dans la majorité paysanne, elle ne joue qu’un faible rôle dans notre société contemporaine, ou la grande majorité des capitalistes et des salariés sont "déchristianisés", ne pratiquent régulièrement aucun culte. Si la religion catholique fut dans notre pays "l’opium" essentiel contre les luttes sociales, elles sont combattues aujourd’hui par des "opiums du peuple" bien plus efficaces : le matraquage médiatique au service du capitalisme, les jeux de hasard ou la "presse-pipol", le sport-spectacle au service du fric, les diverses drogues, etc. Qui pourrait prétendre que l’irrationnel se limite aux religions quand on voit proliférer les sectes et leurs gourous manipulateurs, quand les voyants et les horoscopes sont présents partout ?

La croyance religieuse, ou l’incroyance rationnelle, sont des choix personnels, qui n’empêchent en rien la conscience de classe : on a vu des catholiques ou des musulmans combattre dans des guérillas marxistes en Amérique latine (et en France dans les FTP). Il a même existé une fugace cellule du PCF au sein du Grand Séminaire de Paris dans les années 1960, sur des bases anticoloniales...Même si la plupart d’entre eux sont agnostiques [1], les Communistes ne peuvent tenir l’athéisme pour un dogme inhérent à leur idéal : ce serait en faire une religion, ce qu’il n’est pas.

Religions et intégrismes religieux

"Terrorismes", "intégrismes", "Islamiques", "Islamismes","Djihadismes" : tous ces mots bruissent à longueur de journée dans nos médias actuels aux ordres du Capital, et sont de plus présentés comme s’ils étaient synonymes. Ces confusions délibérées sont une façon de manipuler l’opinion pour des raisons politiques. Toute approche sérieuse des religions doit redonner à chacun de ces mots leur sens véritable.

Il existe une grande variété de religions dans le monde. Les plus répandues, chrétiennes et musulmanes, se sont divisées encore en catégories différentes, au fil des siècles : les chrétiens en catholiques, orthodoxes, et protestants issus de diverses réformes, les musulmans en sunnites, chiites, etc. Mais ces distinctions officielles ne suffisent pas à appréhender la complexité des pratiques religieuses.

Certaines religions se veulent monolithiques, comme le catholicisme, dont le clergé et les dogmes relèvent d’un Pape qui est en principe un monarque absolu et officiellement "infaillible" en matière de croyances. En fait, elles ne se réduisent pas à leurs dogmes, elles sont toutes différentes d’un pratiquant à l’autre, et d’un pays à l’autre, en fonction de l’histoire et du contexte social : il y a autant de catholicismes que de catholiques, de protestantismes chrétiens que de protestants, de pratiques du judaïsme que de Juifs pratiquants, de façons de vivre l’Islam que de Musulmans, etc. Dans chacun de ces cultes, cohabitent des pratiquants humanistes, ouverts au dialogue, et d’autres rigoristes et intolérants.

Toutes les religions ont connu des périodes de tolérance et de progrès, et d’autres de persécutions et de guerres faites au nom de Dieu : Ainsi l’Islam a favorisé les sciences et les arts en Méditerranée durant notre Moyen Âge, alors que les chrétiens d’Europe brûlaient sorciers et hérétiques. Au XXIeme siècle, les pays musulmans, qui ont subi les colonisations et l’impérialisme occidental, connaissent une crise sociale et politique, qui se traduit par la croissance des intégrismes ou Islamismes. Ces intégrismes prétendent retourner à un Islam des origines, purifié des tares du monde moderne, en s’inspirant des préceptes juridiques du Coran (la Charia) rédigés pour la société arabe nomade du VIIeme siècle.

En fait, ces courants au sein de l’Islam sont une manipulation politique des sentiments religieux, au profit d’idéologies réactionnaires (contre l’égalité sociale, entre hommes et femmes, et contre la démocratie politique). Dans les pays du Maghreb, l’Égypte, ou l’Irak, les intégrismes ont permis aux partisans de l’inégalité sociale de détruire l’influence des partis progressistes, communistes et des syndicats ouvriers.

Quand ils se sont transformés en mouvements armés et terroristes, comme en Algérie après 1990, ou au Moyen Orient sous le nom de DAESH ou AL QAÏDA, ils ont causé des dizaines de milliers de morts, qui sont presque tous des Musulmans, souvent des militants progressistes.
Les communistes doivent sans relâche répéter que la religion musulmane ou islamique et les musulmans en général ne sont pas responsables des intégrismes islamistes, dont ils sont les premières victimes.

Les impérialistes occidentaux ont d’ailleurs toujours soutenu le terrorisme islamiste dont ils prétendent aujourd’hui être les ennemis : en Afghanistan il y a 30 ans, quand la CIA aidait Al Qaïda à combattre les communistes Afghans et leurs alliés soviétiques. En Libye plus près de nous, quand Sarkozy détruisait l’état national de Khadafi avec l’aide des bandes intégristes. En Syrie aujourd’hui encore, quand l’Occident soutient les insurgés islamistes contre le gouvernement élu.

Le terme "djihadistes" dont les terroristes intégristes s’affublent et que nos médias reprennent à leur sujet révèle la malhonnêteté de cet amalgame : le djihâd en Islam est le combat moral personnel que chaque musulman doit mener contre ses mauvais instincts. Les mercenaires intégristes partis en Syrie " faire le djihad" contre le gouvernement syrien sont, eux, inféodés à une idéologie d’inspiration fasciste et sont souvent des délinquants, sous des prétextes religieux fallacieux.
Les communistes ne doivent cesser de rappeler que les intégrismes terroristes ne sont pas une spécificité de l’islam, que le fascisme franquiste en Espagne ou celui des oustachis en Croatie au xxeme siècle se réclamaient du catholicisme, de la " croisade pour le christ-roi ", que des intégristes hindouistes sévissent en inde, que des intégristes juifs participent au gouvernement israélien, et que des intégristes protestants sont proches de Trump aux États Unis d’Amérique...

Rigorisme et intégrisme, culture et religion

Toutes les religions combinent deux dimensions différentes, qu’elles soient "du Livre " (Bible, Évangile, Coran) ou pas, une Morale, généralement humaniste, charitable ou altruiste, et un rituel de pratiques, constitué au cours des siècles, et souvent hérité de sociétés antérieures ou de cultes plus anciens. Certains "croyants" s’attachent surtout aux impératifs moraux qui guident leur conduite, et qui sont finalement assez proches de ceux en usage parmi des "incroyants" altruistes comme les Communistes, qui n’en attendent pas une récompense divine.

C’est bien cet altruisme commun qui a favorisé durant le XXeme siècle le mouvement communiste dans des pays majoritairement catholiques comme l’Italie ou la France. D’autres " croyants ", au contraire, réduisent leur foi à un ensemble de pratiques, d’inspiration divine ou prophétique selon eux, qu’ils considèrent comme immuables : interdits alimentaires ( halal musulman, casher juif, végétarisme hindouiste, carême chrétien ), obligations vestimentaires (voile islamique), prières à heures ou à dates fixes, constituées de textes consacrés, etc.

L’usage ritualiste de ces pratiques jugées par les intéressés d’obligation divine constituent ce qu’on nomme le rigorisme : cette attitude personnelle est parfaitement respectable, même si elle ne nous convient pas, tant que son adepte ne prétend pas l’imposer aux autres et à la société qui l’entoure. Vers 1960, de nombreuses Françaises catholiques pratiquaient jeune et abstinence, se couvraient la tête d’un foulard pour aller prier à l’église : cela ne gênait en rien la laïcité de l’état français, alors que le financement des écoles privées décidé par les gouvernants MRP de la IVeme République fut une entorse à cet idéal laïque (toujours en vigueur).

Le rigorisme n’est pas l’intégrisme. Ainsi il serait absurde (et contre-productif ) d’empêcher en France le port du voile dit islamique ou le jeune du Ramadan. Mais il est inacceptable que ces pratiques soient imposées par la loi comme c’est le cas en Arabie Saoudite, ou comme les intégristes cherchent à le faire par la pression sociale en Algérie, voire dans certaines banlieues françaises. Il est ainsi regrettable que des élus municipaux français aient accepté de se laisser imposer la séparation des sexes à la piscine ou au dispensaire sous prétextes religieux. Et regrettable aussi que sous prétexte de laïcité d’autres élus aient supprimé la possibilité dans une cantine de manger autre chose que du porc.

Nous devons par ailleurs éviter de confondre religion et culture. Ainsi la France des Xxème et XXIeme siècles est dite déchristianisée, car la pratique des cérémonies religieuses ( communier à Pâques, faire le jeune du Carême, etc ) est devenue très minoritaire. Mais beaucoup de non-pratiquants ou même " incroyants" sont de culture catholique ou chrétienne, attachés par exemple aux fêtes de Noël ou de Pâques laïcisées, etc.

Les politiciens libéraux comme Macron savent flatter cette religiosité latente tout en professant la laïcité, voire l’agnosticisme proclamé. En Afrique ou au Moyen-Orient, où la grande majorité des citoyens pratique une religion, surtout l’Islam, la culture musulmane est généralisée, même parmi les " incroyants" minoritaires. Il ne faut pas d’ailleurs attribuer à la religion pratiquée dans un pays les comportements positifs ou néfastes, qui relèvent souvent de la culture, et de l’histoire. Ainsi, les mentalités patriarcales (soumission de la femme a l’homme, de l’épouse au mari et de la fille au père et aux frères) sont très répandues en Afrique et au Moyen Orient, alors qu’elles ont diminué en Europe occidentale. Cela ne signifie pas qu’elles soient causées par l’Islam, même si leurs partisans les justifient par le Coran.

Elles ont dominé toutes les sociétés méditerranéennes chrétiennes jusqu’au XXeme siècle, de la Sicile à la Corse ou la Croatie. Autre exemple probant : l’excision des filles, cet épouvantable coutume que bien des pays africains ont du mal à éliminer, est plus répandue en Éthiopie chrétienne qu’au Maghreb musulman. Et la polygamie est au Moyen Orient un héritage des sociétés antérieures à l’Islam, que les intégristes d’Arabie Saoudite prétendent justifier par une lecture littérale de certaines sourates du Coran écrites il y a 400 ans, comme celles sur la lapidation des épouses infidèles.

Faut-il rappeler que dans la Bible juive, on lapide aussi, et que Saint Paul, fondateur du Christianisme, recommandait aux maris de voiler leurs épouses et leurs filles ? Seuls les intégristes sont près à imposer ces préceptes d’un autre temps, pas la masse des " croyants ".

Religions et liberté d’opinion : laïcité

La France a connu durant plus de 1000 ans une monarchie de droit divin, dans laquelle le catholicisme était religion d’état. C’est la Révolution de 1789-94 qui a inventé, pour la première fois au monde, le principe de laïcité de l’État, et la liberté pour les citoyens de pratiquer n’importe quelle religion ou de n’en pratiquer aucune. Après divers retours en arrière, notamment durant la Restauration, les principes de laïcité de l’État et des lois n’a été vraiment mis en place en France que sous la IIIeme République, en 1907, avec la " Séparation de l’Église et de l’État ". Cette laïcité a été imposée alors à l’église catholique et aux partis de la Droite monarchiste, ce qui explique l’anticléricalisme fréquent parmi les progressistes français (alors que le catholicisme, lié au patriotisme, est très fort parmi les travailleurs polonais ou irlandais).

La laïcité est une conquête populaire essentielle de la Nation francaise, que les autres pays d’Europe n’ont pas connue, et qui est souvent menacée aujourd’hui par l’Union Européenne (cf le projet de constitution de l’UE) et ses partisans en France. Elle n’implique ni l’athéisme, ni l’anticléricalisme. Elle considère que les opinions religieuses ou philosophiques, quelles qu’elles soient, relèvent du libre choix de chaque citoyen français, et que le pouvoir d’État n’a pas à s’en préoccuper, ni à les subventionner : en ce sens, le financement de lieux de cultes, d’écoles religieuses, à quelque culte qu’elles se rattachent, catholique, juif ou musulman, par l’État ou une Collectivité, est déjà en soi une atteinte au principe de laïcité.

Les communistes doivent avoir la même approche des idéologies religieuses et philosophiques que des questions sexuelles en société : les affinités sexuelles de chaque individu (hétérosexualité, homosexualité, etc.) ne relèvent que de lui, l’état où la loi n’ont pas à s’en préoccuper. La loi doit seulement intervenir quand ces affinités dérivent vers des comportements criminels au détriment des autres (pédophilie, viol, etc.). De même, les croyances religieuses ou philosophiques ne relèvent que de chaque citoyen, et la loi n’a le droit d’intervenir dans ce domaine que dans le cas de dérives criminelles, intégristes, sectaires," djihadistes ", etc.

Cela doit aussi nous amener à réfléchir à un projet de société socialiste future, qui devra éviter les erreurs commises parfois au sein du " socialisme réel " au XXeme siècle : l’athéisme d’état et les persécutions anti religieuses ont toujours été politiquement contre productives, et sont à long terme totalement inefficaces : à preuve le renouveau de la foi orthodoxe aujourd’hui en Russie.

Héritage comme la laïcité de la Révolution française, les libertés de pensée, d’expression et de presse sont des conquêtes fondamentales à défendre. C’est pourquoi il serait absurde de céder aux pressions de certains notables religieux réactionnaires demandant que l’on interdise la publication de textes ou dessins satiriques anti-religieux ou anticléricaux. Les journaux comme Charlie Hebdo, même quand on est en désaccord avec ce qu’ils disent, doivent conserver le droit de publier sans contrainte légale, il ne saurait être question de laisser renaître " la loi contre le blasphème ", qui existait en France sous la Restauration, en 1820. D’ailleurs les interdictions et les censures n’ont jamais permis de supprimer les idées fausses, y compris racistes et fascisantes.

Cela ne signifie en aucun cas que les Communistes doivent rester sans réagir face aux provocations anti religieuses, qui, en insultant les " croyants ", sont les meilleurs alliés des intégrismes. Quand un politicien du FN assimile "les musulmans", les " Arabes" ou les migrants aux terroristes islamistes, nous devons le dénoncer, comme raciste et réactionnaire. Et il doit en être de même s’il s’agit d’un caricaturiste, quel que soit son journal. Un dessin de presse à toujours exprimé des idées, et l’honneur des communistes a toujours été de combattre les xénophobies, le racisme et l’intolérance.

Francis Arzalier

17/10/2017


[1Au sens strict, l’agnostique ne se prononce pas sur l’existence de Dieu, tandis que l’athée la nie

   

Messages

  • 1. Les communistes et les religions
    6 novembre 2017, 00:01 - par Drweski


    Cet article résume à mon avis très bien l’ensemble de la problématique qui nécessitera bien sur d’être développée point par points, mais il fallait commencer à partir de quelque chose, et ce texte bien construit contient l’essentiel des questions qu’il faut poser et se poser. Je dirai en conséquence que les religions n’échappent pas à la loi du développement de l’histoire et de la lutte des classes, et donc que, comme le disait Thomas Sankara, "on ne lit pas la Bible ou le Coran de la même manière si on est riche ou si on est pauvre". Les communistes n’ont donc pas à hésiter à s’emparer d’une question qui est aussi un champ de bataille qui ne doit pas être laissé à l’adversaire et qu’il ne peut être question de repousser par le mépris ou la méfiance dans le camp adverse les croyants honnêtes engagés dans une voie progressiste. Si Marx a pu être qualifié souvent de "prophète" c’est parce que le côté prophétique des religions peut être considéré comme potentiellement progressiste et en opposition au caractère réactionnaire de la plupart des institutions religieuses qui sont le plus souvent au service des pouvoirs et des oppresseurs.
    Certaines questions abordées dans cette article mériteraient quelques compléments, en particulier celle sur l’histoire de la liberté de conscience dans d’autres aires culturelles que la France ou l’Europe occidentale, ou les confusions que l’on fait fréquemment en particulier sur l’islam en partant d’un point de vue marqué par le prisme du christianisme, ce que l’on retrouve y compris chez beaucoup d’athées "de culture chrétienne". Pour ma part, j’ai rédigé deux articles portant sur certains aspects de ces sujets, l’un portant sur le socialisme, le marxisme et la religion : http://www.lapenseelibre.org/article-le-socialisme-idealisme-ou-materialisme-au-carrefour-entre-croyance-et-raison-79683133.html et l’autre portant sur les bolcheviks et l’islam : http://www.lapenseelibre.org/article-marx-lenine-les-bolcheviks-et-l-islam-n-60-104736418.html . Articles que je verse au dossier. On doit traiter deux choses différemment, la religion en tant que phénomène social dans le cadre du développement historique et de la lutte des classes, et là il s’agit d’une analyse concrète de la situation concrète, et d’un autre côté, la religion en tant que questionnement sur la vie au regard de ce que croient ses adeptes d’un côté mais aussi des avancées de la science qui permettent d’aborder autrement qu’il y a un siècle la question de l’origine de l’univers et celle de l’espace-temps. Or, il arrive encore trop fréquemment que l’on confonde les deux niveaux ce qui produit des confusions dommageables pour la mobilisation politique. On peut être athée ou agnostique et militer avec des croyants pour régler des questions sociales sur lesquelles on s’accorde à partir d’une philosophie de départ différente, et faire par ailleurs en toute liberté des observations et des études sur les sources de la vie sans que cela n’ai forcément directement à voir avec son militantisme.

  • 2. Les communistes et les religions
    6 décembre 2017, 14:38 - par Dybenko


    Agnostique laïc ou matérialiste athée

    Qu’il me soit permis ici d’apporter qu’en même un point de vue particulier. Les deux textes de Francis et Bruno sont deux excellentes illustrations de l’humanisme et de la dimension fraternelle de l’idéologie communiste à l’égard des expressions idéologiques et culturelles des peuples, entre autres celles d’origines religieuses. Que ces dernières ne soient plus les uniques objets de nos ressentiments, certes, mais malheureusement j’ai le profond sentiment qu’aujourd’hui on est tombé dans un excès contraire. Non seulement nous ne rasons plus les églises et ne traquons plus les popes, nous ne procédons plus au dévoilement forcé des femmes musulmanes d’Extrême-Orient comme le firent les bolchéviks, mais aujourd’hui même nous avons renoncé à athéiser nos militants et à développer en leur sein, l’étude et l’appréhension du monde sous forme matérialiste. Plus rien n’est transmis, l’humanisme mou de « tout le monde il beau tout le monde il est gentil » a pris le relais.

    Pour répondre très clairement aux deux auteurs, je ne suis ni agnostique, ni laïc. Je suis matérialiste athée. Dieu n’existe pas. Et au risque de les attrister c’est ce que les stages de formations communistes enseignaient à leurs militants jusqu’au début des années 60, mais aujourd’hui plus aucune valeur de fond n’est transmise par le courant communiste. C’est pourquoi, je n’ai pas apprécié, du tout, l’intervention de la camarade, nous faisant de la « retape » pour la religion musulmane lors de notre réunion au théâtre de la belle étoile. Ce que je n’ai jamais accepté de la religion chrétienne, il n’est pas un seul instant question que je l’accepte de la part de la religion musulmane. Malheureusement pour nous, une certaine lecture tiers-mondiste du marxisme a totalement dévié la lecture du marxisme, et on nous refile aujourd’hui sous prétexte d’anti-impérialisme n’importe quelle idéologie culturaliste, prétendant que tout opiacé provenant des pays en voie de développement est bonne à prendre sous prétexte qu’elle est anti-occidentale.

    Je vais maintenant expliquer pourquoi je ne suis pas agnostique et pourquoi je ne par pas de la laïcité pour me définir. Est agnostique, celui qui dit « Je ne sais pas », or moi je sais : « Dieu n’existe pas ». Sont agnostiques, par exemple, les francs-maçons et leur triangle déiste dont l’œil divin siège au centre. Que disent-ils : « Les lois sont dans la nature, le grand ordonnancement a permis les lois, nous laissons à nos adhérents le libre choix (ie : la Libre Pensée) de dire si derrière, existe la main de dieu ou pas ». Nous communistes léninistes nous avons choisi le matérialisme athée : Dieu n’existe pas. C’est pourquoi, en conformité avec l’Internationale Communiste, non seulement nous avons adhéré aux 21 conditions, mais nous en avons adopté une 22ème, il est interdit, chez nous, d’être Franc-Maçon. Si nous avons interdit à ceux qui disent « je ne sais pas », comment devons nous traiter ceux qui cherchent à nous refiler leur marchandise avariée au crie de : « je sais, je sais » ??!!.

    Pourquoi je ne suis pas laïc, parce que partir du laïcisme, c’est précisément adopter l’attitude de la Franc-maçonnerie. Et cette attitude à une logique profonde, elle éternise les qualités (ou supposées qualités) définies dans l’Etat de droit. Partir de la laïcité c’est éterniser l’Etat de droit et donc s’opposer frontalement au marxisme qui préconise la disparition (l’extinction) de l’Etat et du droit. Nous sommes pour le maintien des nations, mais pour l’extinction de leurs Etats, nous sommes pour la disparition du droit et pour le maintien de la justice. Et il n’y aura pas de communisme tant qu’existeront les Etats, toute la doctrine marxiste et léniniste ne cesse de le répéter.

    Quel est l’idéologie profonde de la Franc-Maçonnerie et des regroupements comme « La Libre Pensée » c’est d’être des contempteurs de l’Etat de droit et c’est pourquoi ils sont un haut lieu de concentration des courants radicaux-socialistes et socialistes tout court. Quel est le mot d’ordre qu’ils partagent avec les groupements religieux, ce mot d’ordre c’est : « Frères », par quoi Marx remplace- t’il ce mot d’ordre quand il arrache la direction de la Ligue des Justes à tout ce courant ! « Prolétaires » !

    Au mot d’ordre « Frères, de tous les pays unissez-vous » (mot d’ordre partagé par Flora Tristan, Georges Sand, etc. ce en quoi le féminisme comme question des genres est englué dans la même mélasse que tous les autres courants culturalistes, notamment les religieux etc. etc.), il substitue : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ».

    Donc tout comme le religieux ne renonce pas à considérer que Dieu existe et guide ses pas, je considère que Dieu n’existe pas et que c’est une matière sans « main invisible » qui guide les miens. Dès lors s’il existe des religieux progressistes, des religieux des lumières, qui veulent un compromis, pour permettre un vivre « ensemble », je suis prêt à leur proposer la laïcité (comme phase historiquement provisoire), produit d’un Etat de droit qui organise et chapeaute derrière la séparation de l’Eglise et de l’Etat, le vivre ensemble. Mais en aucun cas, je dis bien en aucun cas, la laïcité est pour moi un point de départ. Je suis matérialiste athée et j’ai bien l’intention de faire vivre mon point de vue, je veux que le parti communiste, que j’appelle de mes vœux, forme ses militants en ce sens et cesse de laisser aux religieux de tous poils, le monopole du sens de l’existence. J’espère bien qu’un jour les être humains renonceront à leurs illusions non scientifiques et déistes.

    Et parce que je sais que ces illusions, croyances, valeurs, sont aussi le produit d’institutions qui les véhiculent, les amplifient et les reproduisent (des Appareils Idéologiques d’Etat), je travaille dans le même mouvement à vouloir la disparition de l’Etat, des Eglises, comme du Parti Communiste. Ce stade historique s’appellera : le communisme, société sans classes et sans Etat. qui verra une classe unique, classe dominante, classe régnante, s’imposer à l’échelle de l’histoire.

    En ce sens, ne croyant pas à une société sans réalité économique, je ne crois pas à une société sans classe économique. Le but du communisme n’est pas une société sans aucune classe, contrairement à ce que croit Marx. Le but est d’obtenir une classe unique, prolétarisée (non propriétaire des moyens de production) et ouvriérisée (i.e : productrice de survaleur). Dès lors la contradiction portée par le pouvoir ( le communisme comme pouvoir) est la suivante : ou dictature du Parti (i.e : ou dictature des A.I.E, donc maintien de l’Etat) ou dictature de la classe (et donc disparition de l’Etat et des ses A.I.E.), le Manifeste Communiste n’appelle pas à la dictature du parti communiste, il appelle à la dictature du prolétariat.

    Et si je veux tenir compte de cette gadoue que constitue le socialisme, je peux pour satisfaire à cette phase de transition, parler de dictature de l’Etat, et donc du parti, prolétarien à condition de reconnaître que le prolétariat n’est pas la classe ouvrière. Il est constitué de l’union de tous les non-propriétaires, donc durant la phase historique une dernière lutte doit avoir lieu entre les non-propriétaires et les exploités (les ouvriers), puisque la non propriété, qu’exprime la forme publique, engendre une classe qui en vit du fait de la dichotomie entre infrastructure et superstructure : la bourgeoisie d’Etat.

    Pourquoi la bourgeoisie d’Etat a restauré le capitalisme en Russie et pourquoi elle cherche à le faire en Chine c’est la question que nous devons résoudre, mais nous devons le faire dans tous les domaines : idéologiques, culturelles, cultuelles etc. qui constituent les lieux où elle va chercher des valeurs pour se refaire une santé, parce que nous voulons la disparition de l’Etat et de tous ses Appareils, Répressifs comme Idéologiques, qui aident au maintien et à la reproduction des sociétés de classes.

    Pierre Martin

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