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Crise : le bâton pour les salariés, la carotte pour les actionnaires

jeudi 26 mars 2020 par Jack Dion

Alors que la loi d’urgence sanitaire prévoit de véritables reculs sociaux, le gouvernement se contente d’une vague supplique pour que les actionnaires ne se goinfrent pas trop.
Avec les actionnaires et les pontes du CAC 40, il faut être gentil, prévenant, courtois, bref bienveillant. Ce sont des gens très susceptibles.

Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a donc profité d’un passage sur les ondes de France Info pour lancer cette supplique : « Je demande à toutes les entreprises, notamment les plus grandes, de faire preuve de modération (…) sur le versement des dividendes ». Et de poursuivre : « C’est un moment où tout l’argent doit être employé pour faire tourner l’entreprise, pour s’assurer qu’elle redémarre dans de bonnes conditions ».

Les groupes géants sont au chaud

Une supplique pour souhaiter une « modération », c’est ce qui s’appelle prendre des gants préalablement désinfectés. Quand il a décidé de raboter les droits sociaux sous prétexte de coronavirus, le gouvernement a été autrement plus directif. Il a fait voter une loi d’urgence sociale piétinant le Code du travail, destinée en principe à être temporaire, mais sans certitude pour l’avenir. En la matière, l’expérience prouve que le temporaire peut durer et que des restrictions passagères finissent par devenir pérennes. Bref, la méfiance est de rigueur.

En attendant, seuls les salariés sont soumis à des mesures coercitives. Pendant que les dirigeants des groupes géants sont au chaud, et les hauts cadres devant leurs ordinateurs, les ouvriers, les techniciens et les employés doivent travailler plus longtemps, sacrifier une partie de leurs congés payés (ou de leurs RTT) ou bosser dans les pires conditions, souvent sans masque, à leurs risque et périls, au nom de la « relance ». Ce n’est pas encore aujourd’hui qu’on va mélanger la piétaille et les premiers de cordée.

question de légiférer

A l’inverse du vulgum pecus, l’élite du business peut se contenter d’une vague recommandation morale, formulée selon les formes d’usage, avec la certitude que si la réponse est négative, il n’en sera tenu aucun compte. A l’instar des hauts salaires ou des retraites dorées versées par les grandes entreprises, la règle est le laisser-faire synonyme d’assistanat des riches, ou l’encouragement à ne pas faire trop de mal. Mais pas question de légiférer. Ce serait porter le discrédit sur des personnes au-dessus de tout soupçon, comme Carlos Ghosn, par exemple.

Le magot des dividendes est pourtant un scandale permanent. Primo, comme pour le « pognon de dingue » des salaires que se versent les grosses légumes du CAC 40, cela ne concerne ni les PME, ni les start-up, encore moins les artisans, mais uniquement le haut du panier, qui se paie sur les entreprises comme sur la bête.

Le chien de la finance se mord la queue

Deuxio, les sommes en jeu sont gigantesques. Au titre de 2018, les groupes du CAC 40 ont versé 49,2 milliards d’euros à leurs actionnaires. En Europe, personne n’a fait mieux (ou pire, c’est selon). C’est un record dont bien peu se targuent. En effet, il met en lumière le coût du capital, cette anomalie propre au néolibéralisme.
Alors que l’économie bat de l’aile et que l’investissement fait du surplace, une part de plus en plus importante des profits réalisés sert à rétribuer des actionnaires voraces ou à racheter des actions pour rendre plus attractifs le cours en bourse des groupes concernés. En somme, le chien de la finance se mord la queue.

Dans le contexte de crise lié au double choc de la bulle financière et du coronavirus, il serait pourtant opportun de mettre un terme à cette foire aux dividendes. Certains groupes l’ont décidé, tel Airbus. Mais la plupart d’entre eux s’y refusent absolument, à l’instar de Total qui se situe sur la plus haute marche du podium, tant pour les profits encaissés que pour les dividendes versés. Le pétrolier s’est juste engagé à stopper provisoirement le rachat de ses propres actions, ce qui est le service minimal.

A croire qu’ils sont intouchables

Ainsi s’affiche le paradoxe du capitalisme financier à la française. On annonce un peu partout qu’il faut craindre une crise comparable à celle de 1929, on impose des sacrifices aux salariés, on asphyxie le service public, on multiplie les appels à l’union nationale, on racle les fonds de tiroirs de l’État pour empêcher le collapse de l’économie, mais certains peuvent rester à l’écart de toute contrainte, à croire qu’ils sont intouchables.

Si l’on en est à craindre une crise à la 29, il serait temps de demander aux privilégiés, comme le fit en son temps le président américain Roosevelt, de mettre leur casque et de monter eux aussi au front.
Il serait temps de réviser la fiscalité, de réintroduire l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune), d’annuler la taxation préférentielle sur les dividendes, voire d’instaurer un tour de vis fiscal mettant les plus riches à contribution, ce qui leur permettrait de soigner une image bien écornée.

Comme disait Aragon : « Quand les blés sont sous la grêle/ Fou qui fait le délicat ».


Voir en ligne : https://www.marianne.net/debattons/...


Nous vous proposons cet article afin d’élargir notre champ de réflexion. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Dans tous les cas, notre responsabilité s’arrête aux propos que nous reportons ici.

   

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