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Conseil National de la Résistance : un étrange engouement 75 ans après.

lundi 1er juin 2020 par Francis Arzalier (ANC)

Curieusement, ces temps derniers où la peur de l’épidémie a transformé bien des Français en bétail apeuré, la mémoire de la Libération de la France il y a trois quarts de siècle a ressurgi un peu partout. Ils n’étaient avant 2020 que quelques militants "anti-Européens", nostalgiques d’un passé où Gaullistes et PCF collaboraient à chasser l’occupant allemand. Mais on a vu fleurir ces mois-ci d’étranges partisans d’un retour à " l’Union de la Gauche" élargie aux Libéraux-Écologistes, clamer leur volonté d’un " Nouveau CNR ".

D’autres, surgis des décombres des anciens partis centristes à la recherche d’un parcours vers le Pouvoir, paraphrasant un film sur les conquêtes sociales de 1945, parlent des "Jours Heureux " que devrait enfanter le "Monde d’après", assagi selon eux par la pandémie. On a même entendu quelques "philosophes" intronisés par nos médias, comme Onfray, évoquer avec émotion cet exemple d’"Union" entre Gauche et Droite, pour sauver " l’identité française".

Même s’il est souvent peu rationnel, nous ne nous plaindrons pas de ce regain de popularité d’un épisode positif de l’histoire de notre pays. Ce retour d’affection pour cette époque si lointaine où furent nationalisés les transports et l’automobile, où furent inventés la Sécu et Le Statut de la Fonction Publique, est une façon pour la Nation Française malmenée de désavouer les brutes libérales qui nous gouvernent, et s’évertuent à l’appel du MEDEF à détruire tous les acquis qui en subsistent de la Libération.

L’ANC s’est félicitée de voir le 28 mai à Malakoff diverses associations amies, ACCA, ARAC, Mouvement de la Paix, etc…, fêter le souvenir de cette époque faste.
Autre chose est cette escroquerie anachronique et sans scrupule, qui consiste pour des pêcheurs en eau trouble à présenter la construction d’un CNR frelaté comme médicament à la France malade de 2020.

Ce que furent réellement les " jours heureux " de la libération

Le Conseil National de la Résistance, constitué en mai 1943 à l’initiative de Jean Moulin, avait pour but de rassembler tous les mouvements de la Résistance intérieure et extérieure (de Londres, d’Afrique), partis politiques, syndicats, réseaux, etc. Il fut donc un cartel d’organisations très diverses idéologiquement, réunies simplement par la nécessité de coordonner mieux la lutte clandestine armée contre l’occupant allemand et ses supplétifs français, pro-nazis et vichystes.

La majorité des délégués au CNR étaient plutôt de Droite, et Nationalistes. La preuve en est que son président après Moulin fut Georges Bidault, qui sera politicien de centre droit sous la IVème République, l’un des organisateurs des guerres coloniales françaises, et termina son parcours en 1961 à la tête de l’OAS.

Le programme du CNR fut cependant adopté à l’unanimité ( ! ) le 15 mars 1944.

A cette date, le destin de la guerre avait déjà tourné, la défaite des Nazis et de leurs alliés devenait prévisible. Les armées allemandes étaient en difficulté en Afrique du nord, en Italie, et surtout à l’est de l’Europe ou l’Armée Rouge Soviétique progressait rapidement vers la frontière du IIIème Reich.
Ce qui allait amener les dirigeants britanniques et des USA, après avoir longuement tergiversé, à décider le débarquement allié en Normandie ( "second front" ) pour juin 1944. Le rapport de forces était en train de basculer au printemps 44, d’autant que sur le sol français, les multiples actions anti-allemandes étaient majoritairement le fait de la Résistance d’inspiration communiste (FTP).

C’est ce nouveau rapport de forces qui a amené les membres du CNR à adopter un programme de réformes sociales, économiques et politiques largement influencé par le PCF et la CGT, même si certains de ses membres espéraient bien ne pas mettre ces grands principes en application, en vertu du vieux principe politicien " les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent". Et ce sont les gouvernements de la France libérée, de 1945 à 1947, nés du CNR, mais surtout des premières élections générales (plus de 26/100 des suffrages pour le PCF, et 24 pour les socialistes), avec des ministres communistes comme Thorez, Croizat ou Tillon, qui vont mettre en place les grandes réformes des " Jours Heureux " : nationalisations des transports (Air-France), de l’automobile (Renault, Berliet), Statut de la Fonction Publique, Sécurité Sociale, rétablissement du suffrage universel aboli par Pétain, etc.

Malgré les réticences de certains partenaires : ainsi, De Gaulle, a été contraint d’accepter le vote des femmes, dont Il n’était pas partisan, contrairement à sa légende ultérieure ("De Gaulle a donné le droit de vote aux femmes "est une idée commune...et fausse). Et le Général se retira au bout d’un an, parce qu’il refusait d’obéir à la majorité parlementaire. Mais les " Gaullistes " avaient soutenu les projets de nationalisations, d’abord pour punir les industriels " collabos " (familles Renault et Berliet), mais aussi pour disposer d’un secteur d’État important, permettant le développement économique.

Et le soutien de la classe ouvrière influencée par le PCF et la CGT était nécessaire à la reconstruction du pays ravagé par la guerre.
Les " Jours Heureux " s’achevèrent en 1947, quand les communistes furent chassés du gouvernement français (comme en Italie ou en Belgique) par les autres partis issus de la Résistance (SFIO, MRP), à la suggestion des dirigeants Étatsuniens.

Un projet CNR pour 2020 ?

L’histoire de cette période 1944-46 est complexe, mais glorieuse, et nous devons l’entretenir en nos temps de contre-révolution libérale. Mais offrir pour perspective aux citoyens français de 2020 de refaire le CNR est une absurdité naïve ou hypocrite, d’abord parce que la France de 1944 et celle de 2020 sont totalement différentes.

Le pays était, il y a 76 ans occupé militairement par l’armée allemande, ce qui signifiait le pillage par trains entiers, les déportations de Juifs, de salariés, de Résistants, l’exécution de milliers de militants en tant qu’otages ou pour faits de résistance. Une situation qui justifiait tout à fait la lutte armée, et l’accord politique avec toutes les forces, de Droite ou de gauche, attachées à la libération du territoire. D’autant qu’au sein de cette " Résistance", les Communistes tenaient une place essentielle par leur action, et le prestige des combattants soviétiques en passe de vaincre le Nazisme.

En 2020, il est inexact et dangereux politiquement de prétendre que les dirigeants et la bourgeoisie Françaises contraints d’organiser la destruction des conquêtes sociales par l’Union Européenne. Car, si gouvernants français et allemands sont en concurrence pour le leader-ship du continent, ils aspirent tous deux à améliorer et renforcer l’Union Européenne supranationale, qu’ils ont créée, et qui incarne leur ideal de gouvernance libérale contre les salariés.

Prétendre unir tous ceux " souverainistes " contre l’UE, reviendrait à organiser une coalition politique largement dominée par les partisans du Capitalisme, d’autant que le Parti Communiste et la CGT sont pour le moins affaiblis. Et que le Gaullisme, dans lequel se reconnaissait autrefois une grande partie de la bourgeoisie française, est mort depuis qu’à la fin du XXème siècle, elle s’est convertie au libéralisme mondialiste et aux délocalisations. En 2020, mis à part quelques nostalgiques chenus, le Gaullisme s’incarne surtout dans des politiciens nationalistes comme Florian Philippot, qui fut longtemps dirigeant du Front National avant d’en être évincé par Marine Le Pen.

Il est donc malsain et anachronique de prôner aujourd’hui une renaissance du CNR, que les motivations en soient naïves ou hypocrites. On voit d’ailleurs se dessiner une manipulation similaire, quand de bons apôtres parlent de " Front Populaire " pour appeler à un salmigondis politicien où se réuniraient Droite, Gauche, et Écologistes, ensemble au service d’un libéralisme rajeuni d’une touche de vert.

Cette falsification de la mémoire progressiste de la nation française ne doit pas nous leurrer :
la société française actuelle souffre aujourd’hui du capitalisme et de l’impérialisme, et ne s’en guérira qu’en s’en débarrassant.

Il ne peut donc y avoir pour nous d’autre objectif politique qu’unir dans les luttes quotidiennes la majorité de notre nation qui les subit, pour une autre société, dans laquelle le souci du service public remplacera la logique égoïste du profit des actionnaires et de leurs serviteurs.

   

Messages

  • 1. Conseil National de la Résistance : un étrange engouement 75 ans après.
    1er juin 2020, 13:53 - par RICHARD PALAO


    D autant plus que lorsqu il faut passer aux actes , la CGT ne se réfère plus au programme du CNR , on l a vu pendant la réforme des retraites ou elle défendait le système actuel et ses 43 régimes qui nous a été imposé par la droite et le patronat pour empêcher la création le système unique et universel voulu par le CNR ...
    Impossible donc de creer un CNR avec ceux qui se sont convertis au social libéréalisme de l UE .

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