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Salut, Léo !

samedi 4 septembre 2021 par Francis Arzalier (ANC)

Étienne Micheli, dit Léo, est mort le 30 aout 2021. Il avait conservé son pseudonyme acquis dans la Résistance contre les Fascistes italiens qui occupaient la Corse en 1942. C’est la seule décoration qu’il était fier de conserver, lui dont la vie depuis sa naissance dans une famille ouvrière de Bastia il y a 98 ans n’a pourtant pas manqué d’épisodes héroïques.
Cet homme communiste a été mon ami, durant de multiples années, malgré la différence d’âge, ce qui m’autorise à témoigner, de ce qu’il fut, et de ce qu’il m’a dit.

Communiste dès sa jeunesse, alors même que le PCF et les JC avaient été interdits par le gouvernement de "Gauche"Daladier en 1939, il continue clandestinement son activité militante parmi ses compagnons de l’école normale de Corse du Nord. Il sera de ce fait l’un des fondateurs de la Résistance antifasciste dans l’île, notamment en organisant des manifestations interdites de jeunes ou de femmes. Il a rédigé pour le Front National (organisation de Résistance créée par le PCF) un " Appel au Peuple Corse " l’incitant au soulèvement, distribué par les militants le Ier Mai 1943.

 19 ans, il est avec l’instituteur Jean Nicoli, et quelques autres (Bénigni, Vittori, Giovoni) tous communistes, l’un des dirigeants de l’insurrection populaire, déclenchée durant l’été 1943, malgré les réticences de De Gaulle, qui la jugeait "aventuriste". Elle parviendra cependant à libérer la Corse (un an avant le reste de la France) en chassant les occupants italiens et allemands. Avec l’aide de quelques centaines de soldats venus d’Algérie libérée par les Alliés, mais surtout grâce à l’unité des maquisards corses contre le fascisme, et aux sacrifices de martyrs comme Jean Nicoli, massacré par les Mussoliniens â Bastia.

Sitôt son Ile redevenue française et libre, Léo va en Algérie combattre pour la Libération de la France, et y découvre que l’exploitation coloniale y persiste malgré la fin proclamée du régime Vichyste.

Une fois Paris libéré, ce jeune militant corse est aspiré par la direction nationale du PCF, devenu grâce à son rôle éminent dans la Résistance le Parti le plus influent de la France libérée
(plus du quart des votants en 1946, et plus de 500 000 militants). Et durant près de 10 ans il est très proche de Jacques Duclos, qui avait dirigé le PCF clandestin durant la guerre, et qui restait le second de Maurice Thorez, revenu de son exil en URSS pour reprendre le Secrétariat général â Paris. Durant ces dix ans, Léo (c’était aussi le pseudo de Duclos en clandestinité) fut son secrétaire, au cœur de l’appareil central du Parti, au point de l’accompagner lors de rencontres internationales (avec les Communistes Yougoslaves et Soviétiques notamment), et même de signer à l’occasion un article écrit par Duclos dans les Cahiers du Communisme, qui exprimait en 1955 son choix de l’indépendance algérienne, une opinion que ne partageait pas encore la totalité du Bureau Politique.

En 1956, le Bureau politique français refuse de publier les décisions du PC soviétique faisant de Staline défunt le responsable de tous les défauts de l’URSS depuis la mort de Lénine (rapport de Khroutchev au XXéme congrés du PCUS). En désaccord avec ce déni, Léo abandonne alors ses responsabilités au secrétariat de Duclos, et finira sa carrière professionnelle au sein de la maison d’édition Larousse.

Contrairement à ce qu’affirme l’article publié par le journal l’Humanité, toujours empressé â condamner le PCF d’avant sa "mutation" opportuniste, il n’a pas été exclu dès son Parti, et a continué jusqu’à la fin de sa vie des relations étroites et confiantes avec les Communistes de Corse, alors que sa profession le contraignait à résider en Ile de France.

C’est dans cette optique militante que Léo est allé témoigner en 1979 devant la Cour de Sûreté de l’État, qui jugeait les membres du FLNC interdit. Lui, qui n’avait aucune complaisance pour l’idéologie des clandestins séparatistes, dont les Pères avaient parfois collaboré avec le Fascisme (comme les partisans corses de Doriot), est allé néanmoins les défendre en tant que communiste, ces " fils d’un peuple corse livré au chômage et â l’émigration forcée par le non-développement et la spéculation touristique".

Toujours prêt à se dépenser pour valoriser le souvenir et l’héritage de la Résistance, cet homme gentil et discret (parfois trop sur son expérience passée !) aura été tout au long de sa vie un Communiste exemplaire, mélange de liberté intellectuelle, et de fidélité à son idéal.
Il m’a beaucoup appris, m’a fait découvrir le peuple corse, son identité culturelle et ses clivages de classe, et son attachement massif à la Nation Française, fondé en 1789, et renouvelé en 1943. Il m’a aussi appris à mieux appréhender les joies et les désarrois d’une vie de militant.

Lui qui a vécu dans la souffrance le déclin du PCF englué dans l’électoralisme, et qui n’a pourtant jamais désespéré de l’avenir.

L’Association Nationale des Communistes (ANC de France) salue la mémoire de Léo Micheli, qui restera un exemple vivant pour nous et notre combat pour le Socialisme, " pour les spoliés de la Terre ", selon la formule de son camarade Jean Nicoli.

   

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