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Pour l’exemple : l’État italien n’en fini pas de se venger des communistes qui lui ont fait peur dans les années 70

dimanche 17 octobre 2021 par Rete dei Comunisti

Cercle manouchian/Paris-Présentation de leur film par les camarades italiens de Rete Dei Comunisti“.
Les racines en l’air. Notes pour une Histoire de classe” (27 min, juin 2021) est un mini-documentaire pensé et réalisé par la Rete dei Comunisti (Italie), pour aider à comprendre les luttes politiques et sociales des années ‘60 et ‘70 en Italie, les raisons de cet affrontement politique, pourquoi l’État ne veut pas clore cette saison et de quoi il a encore peur.

Nous assistons à une puissante tentative de réécrire l’Histoire.
L’État, qui est sorti victorieux du conflit de la seconde moitié du XXe siècle, avait un besoin : effacer la possibilité de penser et de mettre en œuvre un changement de la situation existante. Cet attaque représente bien évidemment un règlement de compte avec le passé, qui prend en Italie la forme de l’annulation des raisons du conflit de classe depuis la guerre, mais surtout un rappel, un lourd avertissement à ceux qui n’acceptent pas une histoire que certains voudraient terminée et immuable.

Aujourd’hui encore, parler de la “guerre de basse intensité” en Italie semble faire trembler les squelettes des placards de l’État italien ; en effet, la “stratégie de la tension” avait un objectif clair et défini : empêcher toute forme de transformation sociale et politique du système capitaliste et atlantiste mis en place à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

La démonstration la plus dramatiquement évidente de cette stratégie s’est manifestée surtout, mais pas seulement, avec le massacre de la Piazza Fontana à Milan en 1969, ce 12 décembre qui pour nous ne sera jamais une date ordinaire du calendrier mais représentait un saut quantique dans la “guerre non déclarée” de l’État italien, avec les services militaires américains et les organisations fascistes, contre le mouvement ouvrier, la gauche radicale et les communistes de notre pays.

Par conséquent, ce qu’on appelle “l’assaut du ciel” n’était pas un vœu pieux ou un élan utopique, mais une nécessité historique et politique dont les fondements se trouvaient et se trouvent encore dans le grand climat d’effervescence sociale et de mobilisation de ces années-là : des luttes étudiantes à celles contre le coût de la vie, des occupations d’usines aux manifestations de solidarité avec les luttes pour l’indépendance et l’autodétermination des peuples du monde entier.

L’appareil répressif de ces années-là (lois héritées du fascisme, lois spéciales, arrestations de masse, prisons spéciales, torture) représentait la seule réponse possible à un système de pouvoir chancelant, incapable de maintenir cette “paix sociale” apparemment garantie par le boom économique.
Rien n’a été épargné à ceux qui ont osé défier le système et les institutions de l’État qui, depuis les premières années du soi-disant “reflux”, a mis en œuvre une campagne totale de destruction à coups de marteau de la mémoire historique et politique pour réécrire une autre histoire, celle des “extrémismes opposés” et des complots et supports de la manipulation conspirationniste.

Pourtant, la soif de vengeance de l’État italien, incapable d’assumer son passé et son histoire, est revenue frapper ceux qui ne se sont jamais repentis et se sont dissociés de ces luttes. En témoignent trois événements survenus entre avril et juin de cette année, qui ne peuvent être encadrés et compris s’ils ne sont pas pris dans leur ensemble.

Premièrement, les arrestations d’exilé.e.s italien.ne.s en France et la énième tentative d’extradition vers l’Italie. Vouloir frapper ces exilé.e.s politiques italien.ne.s était une démonstration de la réaffirmation du pouvoir d’un État en réalité faible, vidé par le processus d’intégration européenne de toutes ses fonctions de médiation et de décision politique et sociale.
Cet État, qui n’a plus que l’exercice de ses fonctions répressives, a pris sur lui de tracer une ligne entre le passé et le présent, évidemment dans un sens répressif : pour ceux qui prennent parti contre lui, il n’y aura que guerre et vengeance.

C’est le message qu’ils ont voulu envoyer aux jeunes générations en particulier, un signal pour décourager ceux qui ont aujourd’hui l’intention de s’engager à un niveau militant et organisé dans les luttes sociales et politiques.

Le deuxième fait concerne ceux qui sont déjà en prison et contre lesquels l’État se venge. Cesare Battisti, ancien militant des Prolétaires armés pour le communisme (PAC), a longtemps été réfugié en France, avant d’être arrêté en Bolivie et extradé en janvier 2019.

En juin, il avait entamé une grève de la faim pour protester contre ses conditions de détention dans l’aile de haute sécurité (AS2) de la prison de Rossano, alors qu’il a été maintenu à l’isolement au-delà des six mois prévus par la sentence.
Après plus de vingt jours, il a réussi à obtenir un transfert à la prison de Ferrara, mais son régime de détention en haute sécurité n’a pas du tout changé. Ses conditions de détention sont manifestement celles que l’État voudrait aussi réserver à ses compagnons en exil en France.

Enfin, un cas à première vue moins grave, mais qui touche au cœur de la question de la mémoire historique. Quelques jours après l’interview de Paolo Persichetti, réalisée au début du mois de mai, la DIGOS (la police politique) a lui confisqué tout le matériel papier et les appareils technologiques qui constituaient ses archives personnelles, allant ainsi frapper le travail de reconstruction historique du camarade qui est maintenant journaliste, chercheur, écrivain et historien.

Cela fait partie d’un plan de relecture étatique des 60 dernières années de ce pays et d’une manœuvre répressive rétrograde plus large, qui veut faire taire tous les protagonistes qui luttent encore pour une vérité différente de celle dictée par les vainqueurs.

Donc, en mettant en ligne : persécution contre ceux qui sont encore exilés, vengeance consommée contre ceux qui sont prisonniers et saisie d’une archive historique, agissant directement dans la suppression du plan concret d’information concernant ces années. C’est dans ces formes que se concrétise l’action visant à la damnatio memoriae [1] de l’État italien.

Mais il n’y a pas que la lutte passée dans le viseur des classes dirigeantes de plus en plus en crise de légitimité. La tournure autoritaire et répressive, mise en œuvre par les gouvernements nationaux dans le cadre général de la constitution et du renforcement de l’Union européenne en tant que pôle impérialiste, criminalise et punit toute tentative, même “modérée”, de déclencher une dynamique de conflit, plus ou moins organisée, dans le monde actuel.

Nous avons dit que nous sommes en présence d’un saut dans l’abîme de la civilisation juridique européenne (communiqué en français sur notre site web), malgré la propagande du régime qui veut raconter une histoire différente.

Le vote à Bruxelles de la levée de l’immunité parlementaire des indépendantistes catalans en exil, le silence des institutions continentales pendant la grève de la faim et de la soif du prisonnier politique Dimitris Koufontinas en Grèce, la détention criminelle de Georges Ibrahim Abdallah, nous disent clairement que l’Union européenne est prête à agiter la question des droits de l’homme pour ses propres objectifs de politique étrangère, mais qu’elle est incapable de les respecter à l’intérieur de ses frontières.

La guerre est la guerre, et nos ennemis montrent qu’ils en sont pleinement conscients.

Pour nous, donc, la nécessité d’une “amnistie sociale” comme mot d’ordre pour les luttes d’hier et d’aujourd’hui s’impose plus fortement, sur le plan tactique et stratégique.

Le lourd appareil législatif et répressif hérité du fascisme par notre République, mis en œuvre grâce aux différentes législations d’urgence des années ‘70, n’a jamais été démantelé – il a même été renforcé – et aujourd’hui encore, ceux qui s’opposent de diverses manières à l’état actuel des choses en subissent le poids dans un contexte où le conflit social est devenu un crime tout court.

Succès de la grève des dockers de Trieste contre le pass sanitaire mais aussi à Gênes, Ancone, Turin, Bologne…

Nous sommes conscients qu’une large amnistie pour les “crimes” politiques et sociaux est le viatique pour briser cette cage du “droit de l’ennemi” dans laquelle les années ‘70 ont été emprisonnées et dans laquelle ils veulent encore retenir la lutte de classe dans notre pays.

L’histoire des camarades et de leur rêve/besoin de communisme est une ressource précieuse que nous ne laisserons pas à la merci des tortionnaires et de leurs lois liberticides


[1Dans l’Antiquité, la damnatio memoriae - « damnation de la mémoire » - est une condamnation votée par le sénat romain. Elle vise le plus souvent un puissant, homme ou femme, et consiste à annuler ses honneurs, à effacer son nom des monuments publics, des monnaies, voire à renverser les statues le représentant.

   

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