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L’Islamophobie, une passion à la française. (Chapitre 1)

mercredi 27 octobre 2021 par Badia Benjelloun

La notion de l’islamophobie, reconnue comme un préjugé envers l’Islam, est ancienne. Cette prévention a été identifiée, il faut le préciser d’emblée, chez l’Occidental envers le musulman qui résiste à la conquête armée. Dans son acception actuelle, le terme réapparaît dans les années quatre-vingt du XXème siècle. Nous admettons ici qu’il désigne non pas une aversion ou une critique de l’Islam mais l’ensemble des faits sociaux où des personnes de confession musulmane ou simplement supposées l’être qui subissent des discriminations, de l’humiliation, des brimades et de la violence.

Ce mot ne pointe donc pas ici les opinions négatives, rationnelles ou les moqueries portées sur leur système de croyance mais sur les faits de persécutions, des plus anodines aux plus graves, dont sont victimes les musulmans.

La banalisation des violences verbales à l’encontre des musulmans se constate tous les jours, elle alimente des débats qui n’ont pas qu’une portée théorique ou médiatique. Elle génère une atmosphère de suspicion généralisée et favorise des agressions dans l’espace public, comme l’arrachage de voiles aux femmes portant un foulard.

Elle a concouru à sa formalisation politique faite de règlements et de lois liberticides et sécuritaires visant explicitement une fraction de la population, la plus démunie en leviers politiques et médiatiques. Elle appartient en effet majoritairement au prolétariat et est essentiellement d’origine immigrée. Elle n’a aucun soutien des autorités des pays d’origine qui savent pourtant bien la courtiser et organiser tout un réseau bancaire pour encaisser une part de ses revenus.

L’islamophobie est un ingrédient politique né du besoin vital pour la nation hégémonique d’avoir un ennemi à combattre. C’est aux Usa qu’ont été élaborées les indigentes théories de la fin de l’histoire et du choc des civilisations. L’implosion de l’URSS, contemporaine du triomphe idéologique des néoconservateurs sionistes, seront les détonateurs d’un nouveau siècle, et l’investiture de l’Islam ou du Musulman comme figure de l’ennemi à abattre. Le lourd passé d’une monarchie absolutiste fille aînée de l’Église et un passé colonial mal cicatrisé donneront sa tonalité à l’islamophobie à la française, si singulière par son intensité hystérique.

La Grève des Mollahs

On peut dater l’origine de l’islamophobie ‘nouvelle manière’ à la création de la République islamique d’Iran. Elle avait alors a renversé la dynastie des Shah mise en place par les Britanniques en réponse à une tentative d’établissement d’un État communiste aux lisières de l’URSS. Le Royaume-Uni construisait une digue autour de l’Union soviétique naissante après la Première Guerre mondiale. L’Iran faisait partie de ce dispositif d’endiguement.

Ce moment peut être considéré comme l’acte de naissance de l’islamophobie contemporaine en France. C’était il y a trente ans, en janvier 1983 : confronté à un vaste mouvement social dans une industrie automobile en crise, le gouvernement « socialiste », en pleine reconversion néolibérale et décidé à ne rien céder aux ouvriers, discrédita médiatiquement les grévistes, dont beaucoup étaient immigrés, en les assimilant aux mollahs iraniens.

« Des grèves saintes d’intégristes, de musulmans, de chiites ! », s’enflamma le ministre de l’intérieur. Le stratagème provoqua quelques remous à gauche. Le Nouvel Observateur dénonça cet « anti-islamisme indistinct » qui « conduit à voir en chaque musulman un complice virtuel de Khomeini ». Quant au journal Libération, il y vit le prélude d’un raz-de-marée « raciste ».

Malgré ces avertissements, vite oubliés, l’entourloupe fonctionna. La presse obéissante fit ses choux gras des « intégristes » en col bleu. Satisfaites, la droite et l’extrême droite constatèrent à cette occasion qu’il était plus efficace, pour insulter les « bougnoules », de les appeler « musulmans ».
Ces gens-là posent « problème », nous dit-on, car ils menacent la « république », la « laïcité », le « féminisme », le « vivre ensemble ».

Ainsi encodé, ce racisme raffiné, produit dans les beaux quartiers, imprimé dans les journaux, mis en scène à la télévision, propagé par courriels et sur réseaux sociaux, se dissémine dans toute la société. Laquelle, ainsi habituée à vivre dans un mélange de peur identitaire et d’angoisse sécuritaire, est sommée de traquer les voiles litigieux, de mesurer les poils de barbe et de signaler le moindre « colis suspect ».
Attentifs ensemble !
Ce filon hystérique n’aurait jamais prospéré s’il ne répondait pas à un besoin précis, celui nécessité par l’impérialisme dénommé ‘géostratégie mondiale’. Il fallait interdire à tout prix l’extension de la Révolution iranienne qui menaçait d’embraser tout le monde musulman.

A cette époque Saddam Hussein, laïc, fut défendu par l’Occident contre le régime des Mollahs. Une guerre fut entamée entre les deux pays voisins, elle allait durer huit ans et les épuiser tous les deux, désagrégeant ce qui restait de solidarité entre pays ‘non alignés’. Elle allait finir par emporter l’Irak qui s’est surendetté, près de soixante milliards de dollars dont quatorze dus au seul Koweït, pour acheter des armes occidentales.

Confiant dans le soutien tacite du parrain étasunien, Saddam a envahi le Koweït, province de l’Irak détachée artificiellement par la Couronne britannique, qui surproduisait du pétrole et abaissait le prix du brut. Profitant de ce que sa frontière avec l’Irak était délaissée pendant la guerre, le Koweït avait pompé dans la nappe d’hydrocarbures étendue du côté irakien, commettant un véritable hold-up.

Empêtré dans des difficultés depuis 1991, l’agression de 2003 précipita l’Irak dans un véritable trou noir : plus d’État, plus de structures administratives, plus d’infrastructures, routes, ponts, électricité, écoles, tout est en ruine depuis l’invasion des Usa.

Il a fallu franchir la période de l’effondrement de l’URSS en partie à cause du succès du piège afghan où se sont embourbées les forces de l’armée soviétique dans une guerre ingagnable alimentée par les Usa, les Saoud, le Pakistan et la Chine pour que fleurisse le concept du nouvel ennemi, le Musulman.

Pendant un court moment, le temps que soit mis à exécution le plan de Brzezinski, les combattants musulmans afghans enrôlés contre l’Armée rouge ont été encensés sous la figure du Moudjahid, le « combattant de la liberté ». L’aide étasunienne dans la construction des unités combattantes islamistes destinées à épuiser un régime soviétique prêt à se disloquer est maintenant admise maintenant par tous.

C’est une première phase de fabrication des terroristes islamistes takfiristes qui va donner lieu à sa pleine expression une dizaine d’années plus tard, le 11 septembre 2001.

L’OTAN a ensuite utilisé les ‘Afghans’ comme renfort contre les ‘méchants Serbes’ dans le dur conflit (1991-1995) qui a fait voler en éclat la Yougoslavie. Une fois cette ancienne marche soviétique en plein cœur de l’Europe détruite, il est devenu temps de rendre le Musulman suspect sinon coupable. Un ennemi est nécessaire pour continuer l’expansion du complexe militaro-industriel étasunien qui a pour principal client le Pentagone, vivier dans lequel il recrute les gradés partis à la retraite.

L’hégémonie étasunienne repose sur un certain nombre d’éléments dont trois forment un trépied fondamental. Il est fait du dollar, monnaie d’échange et de réserve, de l’armée et ses bases militaires avec les avancées technologiques longtemps en pointe et enfin de la propagande diffusée par les mass médias. Les médias sont devenus en eux-mêmes une industrie. Elle va jouer à plein dans la diffusion de l’identité du nouvel ennemi sinon universel, du moins de celui de l’Occident.
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En Palestine occupée

Le Musulman deviendra dès lors « le terroriste ». L’occupant sioniste de la Palestine avait enferré l’OLP dans les accords d’Oslo juste après la première guerre du Golfe en 1991- L’OLP s’était rangée dans le camp de l’Irak qui connaîtra une première agression commise par le bloc occidental dans une Coalition. Celle-ci n’aurait pas eu son ampleur, considérable, sans l’apport du social-démocrate français Mitterrand.

Tel Aviv avait encouragé en Palestine occupée l’essor d’un mouvement islamiste, celui des Frères Musulmans, censé n’être qu’une association caritative. Il fallait faire pièce à la Résistance laïque, regroupant toutes les obédiences, nassériens, communistes compris.

Les vols continuels de territoires au profit des colons a fini par radicaliser politiquement le Hamas qui s’est lancé dans des attentats suicides. Le premier a lieu le 6 avril 1994 à Afoula (voiture piégée contre un bus, huit morts, 44 blessés). C’était une réponse à l’attentat odieux perpétré par un disciple de Meir Kahane, le Dr Goldstein, dans la mosquée de Sidna Ibrahim à el Khalil (Hébron) le 25 février 1994, tuant 29 Palestiniens qui faisaient leur prière de l’aube, en blessant et mutilant 125 autres.
Goldstein fut enterré dans une colonie en périphérie d’Hébron, Kyriat Arba. Dans l’homélie qui fut prononcée lors de la cérémonie, il a été célébré comme plus saint que tous les martyrs de la Shoah.

Ces deux déterminations, la révolution islamique, la montée du Hamas (qui accompagne le reflux de tous les mouvements de gauche, marxiste- léniniste, maoïste, guévariste, etc..) sont des facteurs qui ont pesé sur l’orientation d’une propagande à l’échelle mondiale contre l’Islam, « religion terroriste et discriminatoire envers les femmes ».

À suivre ...

   

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