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Retour sur un sommet de guerre dans Hiroshima en état de siège

mardi 23 mai 2023 par Charles Hoareau (ANC)

Maintenant que nous avons quitté le Japon et que nos amis coréens du PDP [1] sont en sécurité, je peux revenir sur le déroulement de ce fameux G7 et sur les conditions dans lesquelles il s’est déroulé du point de vue de la population japonaise et des manifestantes et manifestants hostiles au G7, ce dont les médias ont très peu parlé ici.

Depuis qu’ils existent, les G7, outre leur constitution prétentieuse (les 7 pays les plus riches du monde ce qui n’est d’ailleurs pas le cas) [2] , n’ont jamais été une occasion de réfléchir au bien de l’humanité.

On n’a pas d’exemple de G7 qui ait décidé par exemple de mesures pour éradiquer la faim dans le monde, d’un programme mondial de promotion de l’accès au logement ou à la santé, ou mieux encore de prises de décisions permettant la redistribution des richesses à l’échelle du monde.

Non les G7 ont toujours été une réunion de dirigeants de 7 pays riches qui se rencontrent pour gérer au mieux les affaires du capitalisme international.
Mais celui qui vient de se dérouler est encore plus grave et lourd de dangers pour l’humanité.

Certains auraient pu espérer, alors que nous sommes dans une situation mondiale marquée par la guerre non seulement en Europe mais aussi dans 60 pays de la planète, que des menaces chaque jour plus grandes pèsent sur l’Asie de l’Est, que ce choix-là dans ce lieu marqué si tragiquement par l’histoire, soit guidé par un nouveau « Plus jamais ça ! ».

Un sommet de la repentance en quelque sorte sur le thème : « les guerres que nous avons menées, les bombes que nous avons lancées, ont fait des centaines de milliers de morts, nous prenons l’engagement que cela ne se reproduira jamais, nous allons tout faire pour convaincre les pays en guerre par le monde, en Europe, en Afrique ou au Moyen Orient, de cesser ces folies meurtrières d’un autre âge ».

Bien sûr hélas il n’en a rien été et au contraire ce G7 a certainement été le plus guerrier depuis l’existence de cette instance.

Invitation de Zelenski pour lui permettre de convaincre des pays comme l’Inde de se ranger derrière ses projets guerriers, promesse de livraison de F16 à l’Ukraine, demande à la Corée du sud de livrer des armes (alors que c’est contraire à sa constitution s’agissant d’un pays en guerre), mise en place à l’occasion de ce sommet, d’une trilatérale USA, Japon, Corée du Sud à vocation guerrière…et menaces clairement proférées contre la Russie, la Chine et la Corée du Nord : la panoplie est complète !

Il n’est pas ici question d’analyser en détail (ce que nous faisons par ailleurs) les décisions prises et leurs conséquences mais de voir comment s’est déroulée cette conférence et comment les peuples, en particulier celui qui l’accueillait l’a vécue.

Dès notre arrivée à Tokyo, le ton était donné. Nos bagages sont fouillés et comme je transportais des banderoles du PDP me voilà retenu par la police de l’air et des frontières qui me pose une foule de questions, souvent répétées, sur les raisons de ma présence au Japon, mon opinion sur le G7…

Cela dure maintenant depuis deux heures et me fait craindre de louper ma correspondance pour Hiroshima. Finalement je suis libéré juste à temps et en courant je peux attraper mon vol tout en remarquant que mes camarades, habitués de ce genre de choses, font à ma sortie de ma retenue, semblant de ne pas me reconnaître et que la délégation coréenne s’est dispersée dans la foule de l’aéroport de manière à prendre le vol en s’ignorant les uns les autres : sage précaution ils n’auraient pas manqué de subir le même interrogatoire voire de se faire refouler.

C’est une fois sortis de l’aéroport d’Hiroshima, dans le train qui nous mène à notre hôtel, que nous pouvons nous retrouver et rire discrètement de l’incident.

Le lendemain, le 19, 1ère manifestation.

Combien sommes-nous au total au point de rendez-vous ? Une centaine ?
Je suis étonné du petit nombre de personnes assistant aux prises de paroles préalables et du grand nombre de policiers qui ceinturent le point de départ.

Comme on peut le comprendre, parce que venant d’un européen appartenant à un des 7 pays, mon intervention (photo de Une) à la demande de mes amis du PDP, pourtant sommaire et improvisée, est fortement appréciée du public essentiellement asiatique présent.

Quand la manifestation démarre, celle-ci se renforce immédiatement et le long de son parcours de gens venus de nulle part comme s’ils étaient cachés en attendant le démarrage. Mais le fait le plus marquant pour nous, c’est la façon dont les policiers entourent le cortège, nous demandent en permanence de nous serrer sur un côté de la voie au point de nous empêcher de déplier complètement nos banderoles, nous font presser afin de ne pas laisser plus d’un mètre d’espace avec la personne devant nous et ne cessent de nous crier en japonais des injonctions qui se rajoutent aux slogans incessamment criés dans les mégaphones répartis dans la manifestations et que la foule reprend sans relâche.

Tout au long du parcours (qui dure un peu plus de deux heures) nous remarquons aussi qu’à l’exception d’un grand ilot commercial que nous traversons, les maisons semblent vides, il n’y a aucun signe de vie aux fenêtres des immeubles et les rues sont très dégagées pour une ville de plus d’un million d’habitants.

Nous voyons bien le soutien des rares personnes présentes et leurs signes d’encouragement. Nous comprenons que le dispositif policier agressif et disproportionné doit en décourager nombre d’entre eux de nous rejoindre. Il leur faudrait alors franchir la barrière humaine très serrée des uniformes qui nous entoure.
Nous apprendrons aussi que la ville a été vidée d’une grande partie de ses habitants qui ont eu des congés extraordinaires pour l’occasion et ont été fortement incités à partir si bien que les rues de la ville semblent uniquement habitées par des policiers que l’on trouve en nombre à chaque carrefour, équipés de barrières métalliques qu’ils ouvrent et ferment au gré des consignes et répartis aussi le long des artères, même les plus petites.

Autre surprise de taille, à peine notre 1ère manifestation finie, nous voyons se succéder, dans la même zone commerciale, 3 autres manifestations à quelques dizaines de minutes d’intervalles avec les mêmes slogans, les mêmes pancartes, le même refus du G7 instance de guerre et d’impérialisme…et les mêmes policiers ceinturant de très près les marches, casqués, matraques à la main.

Désaccords entre organisateurs ?
Stratégie coordonnée ?
Plus sûrement morcellement imposé par les pouvoirs publics préférant 4 manifestations réduites qu’une seule bien plus visible…pour une presse internationale d’ailleurs quasiment absente à part une agence américaine, la presse chinoise et quelques petits médias locaux inconnus en France.

Mémorial de la Paix
En allant à Hiroshima nous avions évidemment l’intention d’aller au mémorial de la paix. Non pas pour manifester mais pour nous y recueillir dans ce moment où tout laisse à penser que les dirigeants impérialistes sont prêts à renouveler pareille folie en pire.

Las ! Comme tous les lieux touristiques de la ville, il est fermé : même le parc ! Et considéré comme un endroit stratégique, des centaines de policiers en rang serré en barrent tous les accès. On s’en doutait à voir, au fur et à mesure qu’on s’approchait, la présence policière s’intensifier au point que l’on pouvait dénombrer dans tout l’hypercentre de la ville, un policier tous les 10 mètres de chaque côté des rues.

Dans ce grand pays classé par « la communauté internationale » (sic !) comme un pays « démocratique » (resic !) nous ne doutions pas que nous étions surveillés depuis notre arrivée à l’aéroport.
Certaines questions posées lors de la retenue dans les locaux de la police de l’air et des frontières ne laissaient de plus aucun doute sur la connaissance qu’avait de certains d’entre nous la police japonaise.
Cela s’est vérifié, lorsque, à deux reprises, la voiture de nos amis coréens a été suivie de près par un véhicule de personnes en civil, filatures qu’il a fallu déjouer.
Pour finir dans ce domaine des libertés, juste une observation. À chaque contrôle où nous sommes passés, Nouriati, franco-comorienne, a été retenue et fouillée…Un hasard sans doute qui n’a certainement rien à voir avec la couleur de sa peau…


Quoiqu’il en soit, la délégation ANC a pu porter, aux côtés des pacifistes et progressistes de l’est asiatique, le message de paix anti-impérialiste que nous avions mission de faire connaître.

À Hiroshima, une fois de plus les manifestations et les gestes de soutien ont montré que les peuples veulent la paix face à la menace chaque jour plus forte de déclenchement d’un conflit généralisé.

Plus que jamais gardons « l’optimisme de la volonté face au pessimisme de la réalité ».


[1Parti Démocratique du peuple de Corée du sud qui avait invité l’ANC.

[2Le Groupe des sept (G7) est un groupe de discussion et de partenariat économique de sept pays réputés en 19751 pour être les plus grandes puissances avancées du monde qui détiennent environ les 2/3 de la richesse nette mondiale2,3,4 puis 45 % en 2019 : Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni. Le groupe rassemble 7 des 10 pays avec le plus important PIB du monde, avec l’absence notable de la Chine qui occupe le 2e rang et de l’Inde qui occupe le 5e rang (en 2021). source wikipedia

   

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