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Printemps coréen : vive le peuple de Corée

jeudi 14 juin 2018 par Francis Arzalier

Il y a quelques semaines à peine, Trump, le chef de l’impérialisme majeur dans le monde, menaçait de détruire la petite Corée du Nord par l’extermination nucléaire, clamant sa volonté de " feu et de fureur". En France, les médias macroniens répandaient leur haine contre le dirigeant de Pyong-Yang, le qualifiaient de dictateur et de danger mondial, sans oublier la petite touche raciste méprisante que leurs prédécesseurs de 1950 cultivaient déjà durant la guerre coloniale d’Indochine a l’égard des "nabots du Viet-Minh" ( dixit un Général français ).
Le risque d’un conflit majeur en Asie paraissait alors imminent dans l’opinion française, divisée seulement sur les responsabilités de la crise.

L’épisode suivant, surprenant pour beaucoup d’entre nous, se déroula à l’occasion des Jeux Olympiques d’hiver en Corée du Sud. Alors que les télévisions françaises, d’Etat et privées en chœur, répétaient que "la communauté internationale" unanime était inquiète et indignée par les dirigeants criminels de la Corée du Nord, nous apprimes avec surprise la fusion en une seule équipe des athlètes des deux états coréens, et les discussions amicales engagées entre eux. Nos maîtres à penser médiatiques, un peu gênés aux entournures par ce démenti, laissaient alors entendre que cela résultait de la naïveté des dirigeants du Sud.

Le processus de paix s’est alors enclenché, malgré les protestations de dirigeants bellicistes alliés de Washington comme ceux du Japon, et des militants de l’extrême-droite de Séoul, présentés durant plusieurs jours comme " représentatifs de l’opinion sud-coréenne inquiète". Enfin, le 27 avril, les Présidents des deux États coréens se sont rencontrés a Pan Mun Jon, sur la frontière créée en 1953 a l’issue de la féroce Guerre de Corée,

TROIS ANS D’ENFER ET SOIXANTE DE " GUERRE FROIDE ".

La guerre de Corée, en 3 ans, a fait 3 millions de victimes. Une guerre internationale, dont la réalité est bien oubliée aujourd’hui : Alors qu’en 1950, les forces de la Résistance dirigées par les communistes contre les occupants japonais avaient investi les trois quarts de la péninsule coréenne, les dirigeants nord-américains, déjà furieux de la victoire des Communistes en Chine l’année précédente, ont décidé d’une intervention militaire massive pour " endiguer l’avance communiste ".

La Corée vit donc arriver un " Corps expéditionnaire " ( un terme poli pour dire une armée d’invasion ) de près de 400 000 soldats, dont 88 pour cent étaient étatsuniens ( face à 200 000 nord-coréens ). Mais, pour faciliter l’opération aux yeux de l’opinion, les dirigeants nord-Americains l’ont faite parrainer par le Conseil de Sécurité de l’ONU : le Corps expéditionnaire sera donc composé de quelques milliers de soldats professionnels, de tous les pays alliés, ou vassaux, y compris un contingent français.

Sur le terrain, le chef de l’armée anticommuniste était évidemment le General US, Mac Arthur d’abord, qui proclamait sa volonté de reconquérir grâce à l’arme nucléaire la Chine après la Corée, puis Ridgway qui n’hésitait pas à prôner les armes chimiques. La disproportion des moyens militaires était énorme, les forces nord-coréennes ne parvinrent à résister que grâce à l’aide en armes de l’URSS, et plus encore de l’aide en combattants chinois, trois ans durant.

Au prix de plus de deux millions de morts. Mais au bout du compte, les USA et leurs protégés anticommunistes du Sud, dont beaucoup avaient quelques années auparavant servi l’occupant japonais, durent signer l’armistice de Pan Mun Jon, entérinant le partage de la péninsule en deux états ennemis, la Corée du Sud capitaliste protégée par Washington, et la Corée du Nord Socialiste.

Depuis 1953, chacun de ces deux entités a évolué différemment :
La petite Corée du Nord ( environ 25 millions d’habitants en 2016 ), sous la direction du Parti communiste, sortait détruite du conflit, ses villes et ses usines écrasées par les bombardements US, dépeuplée de millions de jeunes hommes. Elle a eu le plus grand mal à se reconstruire, malgré l’aide de l’URSS et de la Chine. Elle a de plus subi le contrecoup de la mésentente entre les deux géants socialistes, et surtout souffert après 1990 de la disparition de l’URSS. Jusqu’au point de connaître la famine au tournant du XXIeme siècle.

L’encerclement menaçant des forces nucléaires des USA et de leurs alliés anticommunistes ( Japon, Corée du Sud, Taïwan,etc ), contraignait les dirigeants de Pyong Yang à consacrer une grosse partie de leur économie délabrée à l’armée plutôt qu’à la consommation quotidienne. Rien d’étonnant si cette situation de "forteresse assiégée" a favorisé l’évolution du régime politique vers la personnalisation du pouvoir ( au profit des trois Kim successifs, Kim Il Sung, son fils Kim Jong Il à partir de 1994, et le petit fis actuel Kim Jong Un depuis 2011 ), et son caractère militarisé et autoritaire.

Ce n’est que récemment que l’économie Socialiste, plus ouverte, a connu un développement que reconnaissent tous les observateurs sérieux, du Monde diplomatique a l’ONU, même si la majorité des médias Macroniens persistent à asséner leur vision caricaturale. Cela en maintenant les principes fondateurs du Juché, qui sont surtout une volonté farouche d’autosuffisance nationale, économique, politique et militaire.

La Corée du Sud, elle, a reçu après 1953 une aide économique considérable des États Unis qui voulaient en faire une vitrine du Capitalisme en Asie, et un allié asiatique puissant dans la coalition contre l’URSS ( ils ont aidé pour les mêmes raisons en Europe le développement de l’Allemagne de l’Ouest ). Cela a permis la croissance autour de Séoul de sociétés industrielles qui sont devenues des multinationales de dimension mondiale ( Samsung, Daewoo, etc ). Cette transformation progressive de la Corée du Sud en une grande puissance capitaliste s’est accomplie longtemps dans le cadre d’un régime anticommuniste, dictatorial et répressif. Mais, en même temps, le développement de la classe ouvrière y a généré un syndicalisme et des luttes populaires de plus en plus importantes.

LE PRINTEMPS PACIFIQUE DE COREE, ET SES CAUSES

Dans ce contexte d’encerclement par de multiples bases militaires US, de forces aériennes et navales munies d’armes nucléaires, les dirigeants de Corée du Nord étaient persuadés que l’invasion de leur pays par les impérialistes nord- américains et leurs alliés était inéluctable, si le rapport des forces demeurait aussi défavorable.

Dans cette optique, la seule façon de le changer et de sauver l’indépendance nationale était de produire un armement nucléaire capable de riposter à toute agression. Les médias occidentaux et français en particulier clamèrent alors la" menace criminelle du dictateur de Pyong Yang", en oubliant de dire au passage que ces armes nucléaires sont d’abord l’apanage des USA, et de la France son alliée, et que Pyong Yang a toujours affirmé vouloir être capable de riposter, et non d’attaquer qui que ce soit ( c’est la justification française dite de dissuasion nucléaire ).

En dépit des vociférations occidentales, La Corée du Nord a poursuivi ses recherches et essais balistiques, qui sont aujourd’hui achevés avec succès. Ce qui lui a permis de passer à l’étape suivante qu’elle s’était fixée, le rapprochement spectaculaire avec
" l’ennemi " sud-coréen. Il a fallu évidemment pour cela le même désir pacifique à Séoul, ce qui a abouti à la rencontre conciliante du 27 avril, qui a laissé sans voix bien des chroniqueurs parisiens....

Revirement incompréhensible ? Sûrement pas, si l’on se dégage des caricatures médiatiques en cours en Macronie. Et si l’on sait éviter les simplifications d’usage. Ainsi, les caractères des Présidents protagonistes ont peu d’importance quoi qu’en disent nos "experts" ; les colères démagogiques de Trump, les mystères supposés de Kim Jong Un, la bonhommie souriante du Sud Coréen Moon Jae In, ne sont en définitive qu’une façade : le premier se pliera aux désirs de l’Establishment impérialiste des USA, le second ne fait qu’exprimer la volonté d’indépendance nationale inscrite dans les gènes du PC Coréen, et le troisième, qui n’est pas devenu communiste pour autant, se contente de répondre aux souhaits du peuple de Corée du Sud.

En effet, la cause la plus importante des derniers événements, que nos médias ignorent délibérément, est le mouvement populaire sud-coréen en faveur de la démocratie, de la paix et de la réunification. Ces dernières années, les manifestations et les grèves ont réussi à chasser du pouvoir la fille du dictateur, corrompue et d’un anticommunisme virulent. Les syndicats et le Parti Démocrate Populaire, qui vient de tenir son congrès, sont très influents, le Président ne peut qu’en tenir compte....

La prochaine étape de ce " Printemps Coréen " est la rencontre Kim Jong Un-Trump, qui a eu lieu les 12 et 13 juin 2018. Étape bien nécessaire, car pour que d’autres pas en avant vers un traité de paix et la réunification aient lieu, l’accord des deux états coréens ne suffit pas : cette perspective restera bien lointaine tant que l’encerclement militaire menaçant par les armées de l’impérialisme états-unien persistera. La dénucléarisation de la Corée du nord n’a aucun sens sans la disparition des bases, navires et bombardiers US, porteurs d’armes nucléaires de toute cette région extrême-orientale.

Cette rencontre est une première étape positive dans le sens de la paix, même si tous les bellicistes anti Coréens de France et d’ailleurs font mine de ne pas le voir. Elle est en rupture avec les menaces d’extermination proférées par Trump il y a quelques semaines, et reconnaît aux dirigeants de Pyong Yang le droit d’exister sur la scène internationale. Elle peut être le début d’un processus de désarmement dans l’ensemble de la péninsule coréenne et la région du Nord-Pacifique. L’opinion sud-coréenne ne s’y trompe pas, et s’en réjouit, à l’exception de l’extrême-droite anticommuniste.

Les dirigeants bellicistes du Japon ne s’y trompent pas non plus, comme Abe qui a regretté l’entrevue de Singapour. Ce n’est que le début d’un processus, qui doit se poursuivre par la visite de Kim-Jong-Un aux USA, et on ne peut en prévoir l’issue. Les forces favorables à l’impérialisme sont puissantes aux États Unis, au Japon, et en France, et les forces en faveur de la paix ne resteront pas inactives, de Séoul à Manille, Pékin...et Paris : car cela concerne tous les peuples du monde, pas seulement ceux de Corée et d’Asie.

En ce qui nous concerne, nous serons attentifs à tout progrès dans le sens de la paix mondiale, prêts à dénoncer tout recul aussi et son responsable. Sans tomber dans les pièges grossiers dressés par nos faiseurs d’opinion : Il importe peu que Trump soit souriant ou hilare, que Kim Jong Un soit bien coiffé ou amateur de spécialités suisses. La question n’est pas de savoir si nous aimons ou pas la forme prise par l’état Socialiste en Corée du Nord ou en Chine.

Il nous suffit de lutter en solidarité avec les peuples de Corée, pour une future réunification sur une base fédérale, pour la disparition des forces militaires impérialistes ( et pas seulement nucléaires ) menaçant en Mer de Chine la paix du monde, sachant que les choix politiques nationaux dans cette région ne doivent relever que des peuples de la région, Coréen, Philippin, Vietnamien, etc, et en aucun cas de pressions ou interventions de Puissances extérieures.

Parce que nos objectifs de paix se rejoignent, et que nos intérêts sont identiques.

   

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